Le gouvernement congolais a saisi le Conseil de sécurité des Nations unies pour dénoncer clairement l’implication de Kigali dans l’instabilité du Nord-Kivu. Dans une correspondance datée du 14 juin, le ministre des Affaires étrangères de la RDC, Raymond Tshibanda, a demandé au Conseil de «rappeler le Rwanda à ses obligations internationales et exiger le retrait immédiat et sans conditions des mesures de ses forces armées qui se dissimuleraient dans les rangs de la rébellion».
Kinshasa a appelé le Conseil de sécurité de l’Onu notamment à «réaffirmer l’intangibilité de la souveraineté, de l’intégrité territoriale et de l’indépendance de la [RDC], condamner le soutien extérieur dont le M23 bénéficie et tenir ceux qui le lui apportent solidairement responsables de tous les actes répréhensibles commis par ce mouvement».
Cette lettre avait été cependant transmise par le chargé des affaires de la RDC auprès de l’Onu, le 19 juin, le jour même où la RDC et le Rwanda mettaient au clair cette situation à Kinshasa.
Malgré cela, cette lettre est tout à fait valable, a soutenu le porte-parole du gouvernement congolais, Lambert Mende. «Nous sommes un gouvernement responsable. Nous n’envoyons pas des correspondances au Conseil de sécurité sans en évaluer la validité et l’urgence”, a-t-il indiqué.
Pendant deux jours, les délégations congolaise et rwandaise, conduites par leurs ministres Affaires étrangères respectifs, ont eu des discussions qualifiées de “franches et enrichissantes” dans la capitale congolaise. Au terme de cette rencontre, le 19 juin, les deux parties s’étaient engagées à pacifier l’Est de la RDC. Elles avaient même convenu de se retrouver à Goma, le 28 juin, pour évaluer leur engagement sur le terrain.
A la question de savoir pourquoi alors la RDC a saisi le Conseil de sécurité, alors qu’une solution concertée avec son voisin de l’Est semblait être balisée à Kinshasa, Lambert Mende a répondu:
«Le même jour a eu le point de presse mensuel de Monsieur le Président de la République du Rwanda, au cours duquel des choses ont été dites qui n’étaient pas toujours en adéquation avec les conclusions de la visite de sa ministre des Affaires étrangères à Kinshasa. Ce qui a continué à faire planer une certaine perplexité, qui justifie que le Conseil de sécurité soit mis à contribution par le gouvernement congolais qui cherche à rétablir la paix dans cette région de notre pays.»
Lors de son point de presse, mardi, Paul Kagame cité par RFI, avait en effet affirmé: «Le Rwanda n’est pas la cause des problèmes du Congo (…) Les problèmes congolais doivent être gérés par les Congolais ». Il a plusieurs fois réfuté tout soutien aux mutins du M23, que lui reproche la RDC.
A l’issue de la visite d’une équipe gouvernementale au Nord-Kivu, théâtre des combats entre FARDC et M23, Lambert Mende avait confirmé, samedi 9 juin à Goma, la présence des «éléments rwandais estimés entre 200 à 300 hommes» au sein du M23. Ces derniers avaient été recrutés, formés puis déployés du Rwanda vers Runyoni dans le territoire congolais pour combattre dans les rangs des mutins, selon la même source.
Parmi les recrues, il y a des mineurs d’âge, a précisé Raymond Tshibanda, dans sa correspondance au Conseil de sécurité, citant les conclusions d’enquêtes gouvernementales et de mécanismes conjoints institués par les deux pays pour vérifier la situation sécuritaire à leur frontière.
«Alors que dans leur fuite, les mutins avaient abandonné tout leur armement, soit 38 tonnes, récupérés par les FARDC, il a été noté un décuplement de leur puissance de feu dès leur arrivée dans le triangle Runyoni-Tshiangu-Mbuzi accoté à la ligne frontalière entre la République démocratique du Congo et le Rwanda», a-t-il poursuivi.
Négociations
De leur coté, les ambassadeurs africains accrédités à Kinshasa encouragent la voie de négociations pour régler la crise qui prévaut dans l’Est de la RDC. Ils l’ont fait savoir à la presse par la voix de l’ambassadeur de l’Afrique du Sud en RDC, mercredi.
A l’issue d’une réunion de leur groupe à Kinshasa, l’ambassadeur Mashimbye a déclaré:
«Nous soutenons et encourageons les résolutions prises par les deux pays en référence au communiqué final conjoint entre les deux parties [à Kinshasa], qui constitue une voie propice de résolution de la crise.»
Il a, par ailleurs, recommandé aux Etats concernés une surveillance à la loupe de l’évolution de la crise sur le terrain.
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