Dix-sept ans après l’assassinat de feu Serge Maheshe, journaliste de Radio Okapi à Bukavu (Sud-Kivu), fauché dans la fleur de l’âge par des hommes armés, Patrick Maheshe, son frère biologique, lui rend hommage.
Dans son récit, Patrick Maheshe décrit son frère comme un homme brave et passionné par la radio dès son jeune âge.
Mais Patrick ressasse sans cesse le passé. Il garde encore les souvenirs douloureux de ce 13 juin 2007, lorsqu’on lui annonçait la mort tragique de son grand frère.
On dit souvent que le temps a remède à tout. Mais, ce n’est pas le cas pour Patrick. Les années écroulées n’ont pas pu lui faire oublier les conditions tragiques qui ont conduit à la mort de son frère.
Dans un des extraits de son apologie pour son frère, envoyée à la rédaction de Radio Okapi, ce jeune dont le frère a été brutalement arraché à la vie, écrit :
« C’était mon frère. Il était plein de vie, il était le père de deux petits garçons. Il n’avait que 31 ans, il était destiné à de grandes choses. C’était un homme d’actions qui vouait une passion indescriptible pour la radio. C’est cette passion qui l’a conduit à la Radio Okapi, où il a su poser ses empruntes ».
Un cri de cœur
De la plume de Patrick Maheshe on peut aussi lire : « Au sortir des guerres qui verront le Zaïre devenir République Démocratique du Congo, mon frère, Serge était l’un de premiers journalistes de Radio Okapi. Il traversera plusieurs zones déchirées par le conflit, documentant fidèlement les faits, dénonçant toute dérive et toute violation faite aux populations et devenant au passage l’un des journalistes de guerre les plus en vue de son époque. Son professionnalisme et sa bravoure ont alors fait de lui, une voix crédible et respectée, contribuant à renforcer la bonne réputation de la Radio Okapi dans la région ».
Besoin de justice
Aujourd’hui, Patrick qui n’a jamais assouvi son désir de voir son frère grandir auprès de lui, dit garder un goût amer de l’impunité dont ont bénéficié les commanditaires de l’assassinat de Serge Maheshe. Il décrit un procès chaotique, une mascarade, une parodie de justice.
Il veut, par cet hommage à son frère, rappeler à qui veut l’entendre que c’est la justice qui élève une nation. Voici sa rhétorique :
« Comme Serge, le Congo moderne a vécu les vicissitudes de 32 ans du Mobutisme.
Comme Serge le Congo a espéré et cru qu’avec cette nouvelle ère nous verrions l’avènement non seulement de la paix mais également de la justice, les deux toujours ensemble, car l’une sans l’autre est sans avenir.
Comme Serge et beaucoup de Congolais n’ont pas cessé de souffrir entre les mains de ceux qui en ont repris les rennes, soit par leurs actions soit par leurs omissions.
Avec Serge, la RDC et tous ceux qui l’ont aimé, 17 ans après ce fatidique 13 juin 2007, nous restons sur notre soif pour la justice et la vérité ».
Serge Maheshe a été tué le 13 juin 2007. Il venait de quitter son travail lorsqu’il a été assassinat sur avenue Saio à Bukavu par des hommes armés. Le tribunal militaire de Bukavu avait condamné à mort en mai 2008 trois civils, dont les deux tueurs présumés, au terme d'un procès controversé.
Cependant, l'ONU et plusieurs autres organisations, dont Reporters sans frontières (RSF) et l’Union nationale de la presse congolaise (UNPC), avaient estimé qu'il n'avait pas permis de faire la lumière sur ce crime.