La ville de Butembo dans la province du Nord-Kivu fait face à un sérieux problème d'érosions, qui menacent plusieurs quartiers. Les têtes d’érosions occasionnent des glissements réguliers des terrains, avec des dégâts humains et matériels.
La commune de Bulengera est la plus touchée, affirme Anselme Kambale Muhutania, inspecteur chargé de la conservation de la nature au sein du service urbain de l'environnement.
« Par exemple, au niveau du marché Vitsay dans la commune de Mususa, il y a avancée de deux têtes d'érosion. Vers l'institut Kirimavolo, il y a une tête d'érosion qui n'est pas maîtrisée. Dans la commune Bulengera, on en trouve sur la rivière Vihuli, sur la rivière Kisingiri, sur la rivière Kalengeri, sur la rivière Kimemi etc. Dans la commune de Kimemi, on en trouve sur la prairie de l'abattoir public, nous en avons aussi vers Ngule, Bwinyole, vers Munzambayi, etc. », a décrit Anselme Kambale Muhutania.
Facteurs à la base
Le Groupe Académie, une organisation locale qui œuvre dans le secteur de l'environnement, soutient que l'extraction désordonnée du sable dans les ruisseaux et rivières qui traversent la ville, ainsi que la mauvaise gestion des déchets plastiques sont des facteurs à la base de ce phénomène.
« L'extraction du sable dans les ruisseaux qui nous entourent, qui constitue malheureusement un moyen de substance pour certaines familles, mais aussi il y a une mauvaise gestion des déchets plastiques. Ces déchets sont jetés en désordre. C'est comme le cas de Vutsundo, où plus des dizaines des maisons qui sont écroulées à la suite de ces têtes d'érosion », a expliqué Michael Kakule Vutsapu, responsable du Groupe Académie.
« Les déchets en plastique, comme ils ne sont pas dégradables, empêchent les eaux de pluie de filtrer au sol. Ce qui va créer des fissures, qui seront aggravés par la mauvaise canalisation des eaux, et provoquer ainsi des glissements de terrain. L'autre cause, ce sont les erreurs urbanistiques. Ils créent des avenues sur des collines à 90 degrés. Ce qui fait que les eaux de ruissellement descendent avec une forte pression, au point de créer des fissures au sol, au niveau de leur point de chute », a-t-il ajouté.
L'un des espaces les plus menacés c'est la prairie de l'abattoir public de Butembo. Cette concession de 7 hectares, appartenant au ministère de la Pêche et Elevage, a perdu sa forme, avec un large et profond fossé au milieu, causé par des érosions.
Ange Masika Kombi, la gérante de l'abattoir, explique le désastre :
« La concession est gravement menacée par les têtes d'érosion. Ce phénomène a été provoqué par l'extraction de sable. Au paravent, c'était un petit ruisseau. Mais là actuellement, on ne sait même pas le définir, puisque les érosions ont terriblement menacé, au point de déformer l'image de l'espace. D'abord, nous avons planté des bambous, ça n'a pas marché, à cause notamment de la circulation intensive de la population riveraine, mais aussi des bêtes que nous y faisons brouter. »
Tout en reconnaissant le danger environnemental des déchets plastiques, Ange Masika Kombi indique que ces derniers ont été utilisés comme solution contre l'avancée des têtes d'érosion sur cet espace.
« Nous y entassons les déchets de toute la ville de Butembo. C'est devenu presque une poubelle publique. Ça empêche l'avancée des têtes d'érosion, malheureusement ces déchets sont en plastique non biodégradable. Et cela empêche la fertilisation du sol, alors que c'est un espace qui doit produire des herbes pour nourrir les bêtes destinées à l'abattage », ajoute-t-elle.
Des solutions possibles
La plantation des arbres antiérosifs constitue l'un des moyens efficaces pour combattre ce phénomène, a estimé, Michaël Kakula Vutsapu, du Groupe Académie :
« La solution durable, c'est d'abord la plantation d’arbres antiérosifs, non seulement pour barrer la route aux érosions, mais aussi pour faire face aux changements climatiques. Les arbres antiérosifs, ce sont d'abord les bambous, mais également le (filao). Les eucalyptus ne sont pas antiérosifs, ils sont d'ailleurs à la base de ce phénomène. Ces arbres ont des racines qui, au lieu de compacter le sol, le fragilisent en se cherchant le passage. Si on prend le cas concret de la prairie de l'abattoir, d'abord on y trouve un sol argilo-sablonneux. Et je ne trouve pas que les déchets plastiques peuvent encore résoudre une tête d'érosion qui est déjà active, d'autant plus qu'ils y sont jetés en vrac. »
D'après lui, la solution au problème des déchets plastiques, c'est le recyclage.
Du recyclage
Une organisation qui vient de s'implanter à Butembo, qui transforme les déchets plastiques en pavé de construction se charge de ramasser les déchets. Akim Kambale Mudogo, le coordinateur de cette structure explique ce que fait son entreprise :
« Concrètement, ce que nous faisons, c'est d'abord la récolte des déchets plastiques tels que des sachets, bouteilles plastiques, des jerricans détruits, etc. que nous transformons en pavé. Notre usine est vraiment artisanale, et faisons encore face aux difficultés financières, car ça demande beaucoup d'énergies. Par jour, nous produisons 200 à 250 pavés, résultat du recyclage des plastiques ».
Cette organisation appelle donc les ménages à la bonne gestion des déchets, en distinguant ceux en plastique, des biodégradables.