Sous l’égide des évêques catholiques, le pouvoir et l’opposition ont trouvé samedi 31 décembre dernier un compromis politique pour la gestion du pays jusqu’à l’élection du nouveau chef de l’Etat qui va succéder à Joseph Kabila dont le dernier mandat constitutionnel s’est achevé le 19 décembre dernier. Invité de Radio Okapi mardi 3 janvier, l’abbé Donatien Nshole, secrétaire général de la Conférence épiscopale nationale du Congo (CENCO) qui a participé aux discussions a estimé que «l’accord est inclusif» même si le Front pour le respect de la constitution ne l’a pas signé.
Entretien.
Radio Okapi: La CENCO a obtenu la signature de l’accord politique par les parties prenantes aux négociations directes qui se sont tenues au Centre interdiocésain. Mais l’accord ne précise pas la date de mise en œuvre. Comment cela va se passer ?
Abbé Donatien Nshole: Il y a un document annexe qui aura valeur d’accord qui est en train d’être négocié maintenant. C’est sur le chronogramme justement. Dans l’accord il a été dit que la mise en œuvre des dispositions fera l’objet d’un arrangement particulier qui aura aussi valeur d’accord. C’est le travail qui est en train d’être fat maintenant. On n’a pas voulu surchargé l’accord. On s’est limité à de grands principes. Pour la mise en œuvre, les détails vont suivre.
Radio Okapi : Comment ces arrangements vont se faire ?
Abbé Donatien Nshole : Les représentants de chaque partie prenante vont se retrouver autour des évêques pour finaliser cela.
Radio Okapi : Au sujet du nouveau gouvernement, comment tout cela va se passer ?
Abbé Donatien Nshole : L’accord est clair. Le Premier ministre sera présenté par le Rassemblement. Vous savez que tout gouvernement doit être investi par le Parlement. Or, il y a une session [parlementaire] extraordinaire qui va se terminer le 15 janvier puis la session ordinaire commencera le 15 mars. Dans l’accord, on précisera si ce sera possible avant le 15 janvier ou ça va attendre la session de mars. Ce sont tous ces éléments pour lesquels nous devons encore nous convenir.
Radio Okapi : Dans l’accord, on parle du Conseil de suivi qui sera dirigé par Etienne Tshisekedi. Comment va-t-il fonctionner par rapport aux autres institutions ?
Abbé Donatien Nshole : Dans l’accord, les attributions de ce comité sont claires. Le Conseil national de suivi de l’accord ne va pas gêner le fonctionnement des institutions. Il a comme mission principale de surveiller, d’inspecter, de dynamiser par des recommandations tout en respectant les compétences de chaque institution. L’objectif principal est d’obtenir que l’accord soit mis en œuvre dans les bonnes dispositions. Là où il y a un ça ne va pas, ce conseil tirera la sonnette d’alarme. Là où il faudra faire des recommandations, il le fera. Mais il y a des organes qui doivent décider selon leurs compétences.
Radio Okapi : Les délégués de la Majorité présidentielle ont signé cet accord sous réserve, affirmant qu’il n’est pas inclusif. N’est-ce pas là un danger pour la mise en application d’un accord obtenu dans la douleur ?
Abbé Donatien Nshole : Pour moi, ce n’est pas un danger. Je vois ça plutôt comme une distraction. On ne peut pas considérer le manque d’inclusivité au titre de l’accord du 18 octobre pour la simple raison que l’unique composante qui n’a pas signé c’est le Front pour le respect de la constitution. Mais dans le texte, il y a des amendements du Front qui a travaillé du début à la fin. C’est accord, c’est aussi un accord du Front même s’il n’a pas signé. Le problème du front est un problème qui mérite d’être posé. On doit réfléchir pour trouver une solution. Là c’est au niveau du partage du pouvoir. Mais pas au niveau de la quintessence de l’accord. Même les autres qui n’ont pas encore signé. Je dis ‘’pas encore signé’’ parce que ce n’est pas exclu qu’ils signent. Il y a déjà Steve Mbikayi qui s’est annoncé pour venir signer. Ceux-là sont déjà représentés par leurs composantes mais l’idéal serait que tout le monde soit là. Il faut aussi comprendre l’attitude des autres qui n’ont pas signé comme Jean-Lucien Busa ou José Makila. Ce ne sont pas de gens qu’on doit condamner à ce stade. On doit seulement leur faire comprendre les choses. Ils ont raison. Ils ont beaucoup apporté à cet accord. Donc, cet accord est inclusif à mon avis.
Radio Okapi : Quel est le problème réel posé par le Front pour le respect de la constitution ?
Abbé Donatien Nshole : A ce que je sache, le Front est frustré et trouve qu’on n’a pas eu assez de considérations pour lui dans la mesure où lui a renoncé de participer au gouvernement et l’unique endroit qu’il pouvait se retrouver était le Conseil national de suivi de l’accord. Il ne trouve pas juste que la Primature soit donnée au Rassemblement et la présidence du Conseil national de suivi au patriarche de Limete. Du point de vue rationnel, il n’a pas tort mais la réalité politique n’est autre chose. Il y a la personne de Monsieur Etienne Tshisekedi, sa présence là, est une garantie pour un certain public. On n’est pas dans un domaine de mathématique, c’est la compréhension mutuelle qui doit être exhortée.
Radio Okapi : L’accord prévoit la tenue des élections présidentielle, législatives vers la fin de l’année 2017. Avez-vous obtenu des garanties de la part de la CENI pour le respect de ce délai tel que signé par les parties prenantes ?
Abbé Donatien Nshole : Les avis étaient partagés. Il y avait deux groupes d’experts. Les uns affirmaient la possibilité matérielle d’organiser ces élections dans ce délai-là, les autres dont la CENI, pensaient que c’était trop demandé. Finalement, on est arrivé à cette option-là. Le plus important est le travail que fera le Conseil national de suivi qui devra être doté d’une expertise pour bien vérifier les choses. Je crois que les choses se fassent de façon objective. Et pour ça, le Conseil national de suivi dirigé par le patriarche Tshisekedi est une garantie.
Propos recueillis par Ascain Zigbia.