E-commerce en RDC : moins cher, méconnu, parfois difficile d’accès

Une page Internet.

La vente en ligne se fraie du chemin en RDC. Certains acheteurs préfèrent se procurer des biens via des boutiques qui vendent sur internet. Des automobiles aux vêtements en passant par du matériel informatique, toutes sortes des produits sont disponibles à des prix souvent moins chers que sur le marché physique de Kinshasa et d’ailleurs en RDC. Malgré cet avantage, le commerce électronique suscite encore peu d’engouement. Certains consommateurs émettent des réserves sur la sécurité des transactions. D’autres se heurtent à des vendeurs parfois rigoureux sur l’origine des transactions.

Joseph vit à Kinshasa. En 2011, il a acheté sur internet une voiture d’occasion (31 000 km) au Japon :

«Je suis entré sur le site www.japanesevehicles.com Après avoir opéré mon choix, j’ai demandé une facture pro forma. Japanese me l’a envoyée et m’a communiqué les modalités de paiement. J’ai fait le virement bancaire. Trois jours après j’ai eu la confirmation de la réception de l’argent au Japon. Japanese m’a, par la même occasion, annoncer ses démarches pour l’embarquement de cette voiture. Nous sommes restés en contact permanent sur Internet. J’étais informé de chaque étape par e-mail jusqu’au moment où le véhicule est arrivé. J’ai reçu mon véhicule chez moi à la maison, clé en mains»

La voiture a été livrée an août 2011, trois mois après la commande.

« Ce véhicule m’a coûté en tout 6 500 dollars américains tout frais compris. Pourtant, la même voiture est vendue à 9 500 dollars américains à Kinshasa », explique Joseph ravi d’avoir réalisé des économies.

Parking de vente de véhicules au croisement de l’avenue sport et Assosa dans la commune de Kasa- vubu à Kinshasa. Radio Okapi/ Ph. John Bompengo

Bon prix

Les voitures d’occasion que les Congolais achètent le plus coûtent en effet moins chers en ligne. Une Toyota Rav4 d’occasion fabriquée en 2003 avec un kilométrage inférieur à 100 000 km est proposée à 35 000 dollars à discuter; alors qu’achetée en ligne, transportée par les soins du vendeur et dédouanée aux ports de Matadi ou Boma, la même voiture ne coûte que 13 100 dollars américains.

Les smartphones sont parmi les produits les plus demandés. Un iPhone 5, par exemple, revient à un peu plus de 500 dollars en ligne mais coûte 1 200 dollars à Kinshasa. Et se paie cash.

Les dames arrivent à trouver des tailleurs moitié prix en ligne que si elles achetaient sur place à Kinshasa. Les tenanciers des boutiques ne manquent pas d’arguments. Ils reconnaissent que leurs prix sont élevés et les justifient par « les nombreuses taxes » qu’ils doivent payer à l’importation des marchandises et dans l’exercice de leur activité de commerce.

Des vendeuses de pagne au beach Ngobila à Kinshasa (Ph. Lam Duc Hien)

Sécurité 

L’e-commerce comporte des avantages pour les acheteurs. Ils accèdent à une large gamme de produits et peuvent ainsi faire un choix éclairé. Mais des potentiels acheteurs en ligne sont encore réticents. Ils craignent pour la sécurité de leurs transactions.

De nombreux sites frauduleux existent et il n’est pas toujours facile aux novices de les démasquer, affirme Francis, jeune entrepreneur congolais en ligne.  Certaines personnes craignent aussi d’effectuer des achats en ligne en l’absence d’une sécurité totale sur les moyens de paiement. En plus, les services après ventes peuvent parfois prendre beaucoup de temps.

Pour déjouer les pirates, Christine, 32 ans, a trouvé une stratégie. «J’ai un compte dédié uniquement aux achats en ligne, qui est toujours vide. Je ne l’alimente que lorsque je veux faire mes achats», explique-t-elle.

Mais la difficulté peut parfois provenir des vendeurs en ligne. Par souci de sécuriser les transactions et conserver leur bonne réputation, ils fixent parfois des procédures qui paraissent trop contraignantes à certains acheteurs. Emmanuel, 29 ans, développeur web en a fait l’amère expérience :

« J’ai une carte websurfer obtenu auprès de ma banque. Alors que je devais livrer un site web que j’avais construit pour un client, j’ai eu beaucoup de peine à trouver un hébergeur.

Après trois tentatives infructueuses auprès des hébergeurs qui ne voulaient pas me vendre de l’espace parce que l’achat était effectué depuis la République démocratique du Congo, je suis tombé sur un prestataire de service qui a finalement accepté d’héberger mon site. Mais au préalable, je devais lui expliquer pourquoi j’achetais de la RDC en utilisant une connexion internet identifiée en Afrique du Sud et une carte bancaire domiciliée au Liban que j’avais pourtant obtenue auprès de ma banque ici à Kinshasa.

La RDC figure dans la zone rouge pour certains vendeurs en ligne sérieux. C’est donc difficile d’acheter certains produits. »

Responsabilités des banques

D’autres acheteurs utilisent un compte PayPal, qu’ils ouvrent sur internet. C’est le cas de Marcel, 35 ans, qui s’est procuré un téléphone portable sur amazone. «Après avoir créé mon compte amazone.com, j’ai acheté avec ma carte Visa. Amazone m’a expédié mon colis via une agence de fret de la place [...] Le prix est bas par rapport aux téléphones vendus à Kinshasa et la qualité est supérieure », a-t-il indiqué.

Par contre, Wilfred préfère payer ses articles par virement bancaire. «C’est plus sécurisant pour éviter de me faire pirater mon compte bancaire», soutient-il.

Elir Odio, secrétaire général de la Commission de communication de l’Association congolaise des banques (ACB) recommande beaucoup de prudence aux usagers:

«Les banques mettent à la disposition de leurs clients des cartes internationales, qui permettent des paiements en ligne, comme Visa et Mastercard. Nous conseillons seulement aux clients l’utilisation correcte de ces cartes. Nous leur proposons d’aller uniquement sur des sites parfaitement identifiables.»

« C’est donc risqué et périlleux que d’acheter sur des sites douteux », affirme-t-il.

Un risque et un péril que de nombreux Congolais ne pourront pas prendre de si tôt. Le taux de pénétration d’internet dans le pays est l’un des plus faibles au monde. De nombreuses banques se sont installées ces dernières années dans la plupart des villes, mais leurs utilisateurs ne recourent généralement qu’aux fonctions basiques de dépôt et de retrait d’argent. La plupart de comptes sont des comptes salaires qui sont vidés d’un seul trait à la fin du mois.