Martin Fayulu a été désigné, dimanche dernier à Genève en Suisse, candidat commun de l’opposition pour l’élection présidentielle du 23 décembre prochain. Vingt-quatre heures après la signature de cet accord, Vital Kamerhe de l’UNC et Felix Tshisekedi de l’UDPS sont revenus sur leur décision en retirant leurs signatures « sur demande de leurs bases ». Pour Martin Fayulu, ces deux personnalités ont peut-être pris ces décisions de façon hâtive. Il leur demande de revenir au respect du texte signé. Il parle aussi de la suite du processus électoral et des chances de l’opposition devant le candidat du FCC, Emmanuel Ramazani Shadary. Confiant, il prédit la défaite de son principal adversaire le 23 décembre prochain. « M. Emmanuel Shadary est un candidat très léger », dit-il. Interview.
Radio Okapi : Martin Fayulu, vous avez été désigné candidat commun de l’opposition dimanche. Et lundi, deux des sept leaders Félix Tshisekedi et Vital Kamerhe ont retiré leurs signatures. Quelle est votre réaction après ce revirement ?
Martin Fayulu : C’est regrettable. Je demande à mes deux frères de revenir à l’accord. C’est un aboutissement d’un travail que nous avons commencé ensemble. Et aujourd’hui, le peuple congolais est très content de cet accord, parce qu’il pense que son salut pour demain, c’est cet accord.
En écoutant leurs discours, Vital Kamerhe par exemple reproche le mode de désignation qui a permis votre élection comme candidat commun. Lui et Félix Tshisekedi disent répondre à la demande de leurs bases qui estiment que vous n’êtes pas suffisamment populaire pour représenter l’opposition.
La question de la popularité ? Je passe sur vos antennes. Aujourd’hui, vous n’avez pas d’indications pour dire tel est plus populaire que tel autre. Nous attendons les élections. Mais sur le mode de désignation, le facilitateur ne nous a rien imposé. On nous a proposé ce mode, et on a discuté, et on s’est mis d’accord, tous ensemble. Si quelqu’un n’était pas d’accord, il pouvait le dire avant d’entamer le vote. Je ne pense pas que ce soit le mode de désignation. Je ne pense que ce soit là le sujet. Je demande simplement à ces deux frères, qui ont certainement subi les pressions de leurs bases-comme ils le disent-de revenir. Peut-être qu’ils ont pris des décisions hâtives sans expliquer à leurs bases. Je leur demande de revenir et d’expliquer à leurs bases. C’est pour cela qu’ils sont leaders. C’est pour que de temps en temps, ils fassent aussi comprendre à la base que les intérêts de la nation passent avant les intérêts partisans.
Après ce que beaucoup d’analystes qualifient de coup de théâtre, que devient l’accord de Genève ?
L’accord de Genève existe. Ce n’est pas un coup de théâtre. Coup de théâtre parce que les amis ont pris cette décision [de retirer leurs signatures] ? il y a les 5 autres qui ont signé cet accord et qui ont renforcé leurs positions. Donc l’accord demeure.
Peut-on affirmer que l’opposition ira aux élections en ordre dispersé ?
Non. Je ne pense pas. Vous allez voir dans les jours à venir. Il y a un candidat commun que je suis, et qui est le porte-étendard de tout un groupe. Et le groupe s’est accordé pour un objectif très précis et nous allons tout faire pour que les élections du 23 décembre soient des élections libres, transparentes et apaisées, crédibles, sans machine à voter, sans fichier corrompu.
A entendre votre discours, certains analystes vous classent parmi les artisans du boycott. Entre temps, vous demander le départ du régime « afdelien » [de l’AFDL, le mouvement mené par Laurent-Désiré Kabila pour chasser le feu président Mobutu du pouvoir en 1997]. Est-ce que ce n’est pas contradictoire ? Ne faudrait-il pas mettre de l’eau dans votre vin ?
Rejeter la machine à voter ne veut pas dire boycotter les élections. Nous avons dit que le mot boycott ne fait pas partie de notre vocabulaire. Nous voulons que les élections soient organisées, conformément à la loi électorale, et au calendrier électoral, celui que la CENI [Commission électorale nationale indépendante] a proposé. Elle a cette responsabilité de proposer les élections aux Congolais. Mais dans ce calendrier, nulle part n’est inscrit la machine à voter. Dans la loi électorale, il est clairement dit dans l’article 237 que le mode de vote électronique est interdit pour des élections en cours. Donc, ce n’est pas un langage de radical, mais de quelqu’un qui respecte la loi, qui est collé aux textes et qui veut que le Congo soit réellement un Etat de droit.
Maintenant que l’opposition vient d’étaler sur la place publique ses divisions. Est-ce qu’elle n’est pas en train d’ouvrir un Boulevard au candidat du FCC ?
Non. L’opposition demeure. Elle gagnera les élections. M. Emmanuel Sahdary est un candidat très léger, il ne fera pas le poids. Aujourd’hui au Congo, même si c’est un autre candidat qui vient de ce système « afdlien », il sera battu à plat de couture par le candidat de l’opposition.
Interview réalisée par Alain Irung.