Le stade Tata Raphaël renaît de ses cendres. Ce temple mythique du sport congolais a été réfectionné, depuis quelques jours, par les dirigeants de l’As VClub de Kinshasa et d’autres opérateurs sportifs. Construit en 1952 par le père Raphaël de la Kethule de la congrégation de scheutes, ce stade a abrité plusieurs événements dont le combat historique de boxe qui a opposé Mohamed Ali à Georges Foreman le 30 septembre 1974. Radio Okapi parle des circonstances qui ont amené à la construction de ce stade avec Henry de la Kethule, neveu du Père Tata Raphaël de la Kethule.
Radio Okapi: Vous confirmez que vous êtes de la famille De la Kethule ?
Henry de la Kethule: Oui. Avant d’être le neveu de Père Henry de la Kathule, Je suis le fils de Walpard de la Kethule de Ryhove, avocat près de la Cour d’appel depuis les années 1928 à Léopoldville.
Radio Okapi: Il était le frère de Tata Raphaël de la Kethule ?
Henry de la Kethule: Il était le 15è enfant de la famille brugeoise. Tata Raphaël étant notre oncle parce qu’il est le 5è des enfants de la Kethule, nés à Bruge à Saint-Michel.
Radio Okapi: Vous êtes né à Léopoldville ou en Belgique ?
Henry de la Kethule: Je suis né à Léopoldville comme mes deux autres frères, François, Raphaël et ma sœur Damienne.
Radio Okapi : En quelle année ?
Henry de la Kethule: Moi-même en 1935, mon frère ainé deux ans avant et les autres ont suivi.
Radio Okapi: Vous êtes né ensemble avec l’As VClub et le DCMP ?
Henry de la Kethule : Exactement, je suis né l’année où Tata Raphaël a décidé de fonder deux clubs de noirs à savoir: l’As VClub et ensuite DCMP.
Radio Okapi: Comment expliquez-vous que votre famille soit aussi attachée à Dieu ?
Henry de la Kethule: C’est vrai que nous avons, dans la famille, des tantes et sœurs du Père Raphaël, qui sont des religieuses bénédictines missionnaires qui étaient très entreprenantes au Katanga de l’époque. Une autre religieuse est restée en Belgique dans le cadre d’une autre mission congrégation. Et ça fait quatre religieux parmi les 15 enfants, donc offerts à Dieu pour un meilleur service du développement de relations.
Radio Okapi: Le stade Tata Raphaël n’était pas construit avec le financement du gouvernement belge mais plutôt avec les dons de la famille la Kethule ?
Henry de la Kethule: Construire un stade nécessite des millions de dollars américains. La Belgique a contribué largement à la construction du stade Tata Raphaël grâce à la tombola nationale qu’elle a organisée. De l’argent de cette tombola était accordé pour aider Tata Raphaël dans le financement des travaux d’abord du premier stade Reine Astride, rebaptisé «stade Cardinal Malula». Tata Raphaël était un grand mendiant à Kinshasa et en Belgique. Je suis pour l’instant dans la drépanocytose et je passe un tiers de mon temps à mendier pour permettre aux malades de l’anémie SS d’avoir de meilleurs soins.
Radio Okapi : Vous vivez à Kinshasa ou à l’intérieur du pays ?
Henry de la Kethule: Je suis à Kinshasa mais mentalement je vis partout dans le pays, à Bukavu, Kananga, Lubumbashi, Kikwit, où le réseau drépanocytose SS a ouvert des antennes pour la meilleure approche de la maladie et le traitement des anémies SS. A Uvira, il y a plus de 80 malades drépanocytaires déjà recensés qui attendent notre traitement.
Radio Okapi : une fois construit, le stade Tata Raphaël était resté dans l’état privé ou cédé à l’Etat colonial ?
Henry de la Kethule: Il a été directement cédé à l’Etat colonial parce que Tata Raphaël n’avait même construit pour les pères Schuetz qui avaient accepté qu’il consacre son existence dans le parascolaire alors qu’il avait commencé dans le scolaire. Tata Raphaël a construit plusieurs écoles. Il s’était rendu compte qu’après l’école, en vacances, il fallait mettre ses élèves au travail.
Radio Okapi: Le bilan de tout ce que le Père Tata Raphaël a laissé ?
Henry de la Kethule: Tata Raphaël n’était pas un rêveur car il ne rêvait que ce qu’il pouvait faire. Nous étions persuadés que notre groupe allait persuader. J’avais mendié auprès d’une entreprise de la place la somme de 3 000 dollars mais nous n’avons pas réussi à faire bouger les choses. Je voulais que ça aille à faire sortir les élèves de leurs locaux scolaires pour qu’ils marchent avec des pancartes et réclament la restauration du stade. Quelques années après, les sportifs, eux-mêmes, au travers d’une volonté du gouvernement, se sont emparés de cette situation pour réveiller ce stade. J’ai visité ce stade il y quelques jours. Au vue de l’extérieur, on se rend bien compte qu’on a mis la main dans la pâte.
Radio Okapi: Votre association vient d’avoir une nouvelle vie grâce à ce qui se fait au stade Tata Raphaêl ?
Henry de la Kethule: Ce n’est pas que notre association retrouve une nouvelle vie mais l’importance est que le stade retrouve une nouvelle vie. Que l’émission que nous faisons aujourd’hui rappelle des jalons anciens. Je pensais qu’à un moment donné qu’on va amener des bulldozers à l’idée que ce stade est pourri. On va le niveler et y construire quelque chose de nouveau. Je vivais dans la terreur parce que c’est un monument comme les écoles qui ont également vieilli.
Radio Okapi: Père Raphaël avait-il laissé un testament ?
Henry de la Kethule: Les religieux ont quitté leurs familles biologiques pour entrer dans une autre famille religieuse de la congrégation des scheuts. Avant de faire mes vœux définitifs comme jésuite dans l’ordre de la compagnie de Jésus, j’ai dû signer une à renonciation totale à tous les biens que je possédais avant d’entrer dans la compagnie de Jésus et autre bien qui me viendrait éventuellement d’un héritage. Je ne peux rien posséder, je ne peux pas posséder une maison. J’ai des outils de travail que la compagnie de Jésus me remettra en cas de besoin. Je peux mendier dans le cas bien précis du réseau drépanocytose mais je ne laisserai aucun testament. Je ne sais rien si Tata Raphaël avait laissé un testament mais ça m’étonnerait. Il va laisser un testament pour faire bénéficier qui ? Il n’avait pas d’enfants sauf ceux de ses frères et sœurs. A mon avis, nous entrons dans la vie religieuse pour nous libérer de soucis.
Radio Okapi: Vous êtes aussi né à la même époque que VClub et DCMP. Vous avez eu à supporter l’une de ces deux équipes ?
Henry de la Kethule: Nous suivions cela de très près. Nous habitions sur l’avenue Sénégalais et oncle Raphaël à Sainte-Anne. Tous les week-ends, il venait casser la croute chez nous à la maison. On suivait l’évolution du travail qu’il réalisait dans le domaine parascolaire.
Radio Okapi: le fait d’être issu d’une famille noble a contribué à cet essor ?
Henry de la Kethule: Je ne crois que ça n’a rien avoir directement avec le fait d’être issu d’une famille de tradition aristocratique. Tata Raphaël, contrairement à ses frères et sœurs de sa famille, avait quelque chose de très propre à lui et de très particulier à réaliser.
Radio Okapi: Les hommes formés par père Raphaël continuent de porter le flambeau ou ils l’ont éteint ?
Henry de la Kethule : Avec des années qui sont passées, beaucoup de choses se sont éteintes. Dans les années 60 à 70, il y avait du cœur à l’œuvre et beaucoup de gens croyaient qu’on irait encore plus loin mais depuis un certains nombre d’années les Congolais se sont découragés.
Radio Okapi: vous voulez voir ce stade rayonner davantage ?
Henry de la Kethule: Ce que VClub est occupé à faire avec son sponsor est magique.
Lire aussi sur radiookapi.net: