La société civile du territoire de Beni, la MONUSCO et l’administrateur de territoire de Beni ont échangé le jeudi 19 janvier à Oicha, chef-lieu du territoire de Beni sur la possibilité de renouer le dialogue – même si celui-ci n’avait véritablement jamais été rompu – après les malheureux incidents survenus entre juillet et août 2022, et qui ont exacerbé le sentiment anti-MONUSCO au sein d’une partie de la population de ce territoire du Nord-Kivu.
La MONUSCO a redit sa disponibilité à appuyer les autorités et la société civile dans leurs efforts pour le retour de la paix dans le territoire de Beni. Seulement, à cause de ce sentiment anti-MONUSCO entretenu par la désinformation et la manipulation de certaines couches de la population, la Mission des Nations Unies a regretté d’être limitée dans ses capacités à mettre totalement en application son mandat. Lequel mandat vient par ailleurs d’être renouvelé pour une année supplémentaire par le Conseil de sécurité de l’ONU, avec l’approbation du Gouvernement congolais. D’où l’appel du chef de bureau intérimaire de la MONUSCO à Beni, Abdourahamane Ganda à l’autorité territoriale, garante de la sécurité de tous, à prendre ses responsabilités afin de permettre à la Mission onusienne de travailler sans entraves.
La MONUSCO, partenaire incontournable
Pour le colonel Charles Ehuta Omeonga, administrateur du territoire de Beni, la MONUSCO reste un partenaire incontournable du gouvernement congolais, « libre de circuler partout » à travers sa juridiction. Il en veut pour preuve le fait que la délégation de la Mission des Nations Unies se soit retrouvée ce jour à Oicha à une trentaine de km de Beni.
« Il y a une bonne collaboration avec la MONUSCO, nous collaborons très bien, demandez-leur aussi si nous ne collaborons pas avec lui. D’ailleurs, son mandat a été renouvelé pour une année, avec le consentement du Chef de l’Etat. Nous, nous sommes toujours derrière l’esprit et la lettre du Chef de l’Etat, garant de la Nation. La population ne peut rien faire sans l’autorisation du Chef de l’Etat. La population congolaise est disciplinée. Nous comptons collaborer étroitement avec la MONUSCO, la MONUSCO est libre de circuler. Elle est là pour nous appuyer, nous accompagner », a déclaré l’Administrateur du territoire de Beni. Le colonel Ehuta Meonga qui a saisi cette occasion pour remercier la délégation de la MONUSCO pour les efforts déployés afin de renforcer l'autorité de l'Etat. Il a aussi salué les réalisations de la MONUSCO qui permettent d’apporter des solutions aux problèmes de la région de Beni, notamment la construction et l'équipement du commissariat de Police ou encore du bâtiment du Cadastre. Il s’est enfin engagé à sensibiliser les jeunes à renouveler leur collaboration avec la MONUSCO, un partenaire gouvernemental.
Oui, mais…
Du côté de la société civile du territoire de Beni, on se dit aussi prêt à une reprise de collaboration avec la MONUSCO. Tout en regrettant « les manipulations politiciennes » qui ont conduit aux violences anti-MONUSCO l’année dernière et à la méfiance de la population locale, à cause entre autres de la détérioration de la situation sécuritaire dans l'est de la RDC, ou plus récemment de l'attaque à la bombe à Kasindi le dimanche 15 janvier 2023. Pourtant, la société civile du territoire de Beni annonce la consultation prochaine de la population afin de définir de nouvelles modalités de collaboration avec la MONUSCO.
« Nous sommes venus ici sur invitation de l’administrateur militaire. Vous savez, nous avons beaucoup de projets qui devaient être menés par la MONUSCO mais il y a un des soucis, parce que la société civile est en suspension de sa collaboration avec la MONUSCO. Bientôt, nous allons consulter la population, et nous saurons comment réagir par rapport à l’attitude du gouvernement congolais. Nous, société civile, accompagnons le gouvernement et nous connaissons déjà la position du gouvernement qui a pris acte du renouvellement du mandat de la MONUSCO », a affirmé affirmé Richard Kirimba, premier vice-président de la société civile du territoire de Beni.
« Nous avons beaucoup de recommandations à donner à la MONUSCO et au gouvernement, parce que quand la MONUSCO ne sera plus en RDC, il va falloir assumer des charges et des responsabilités... Cet échange a été sans tabou, un bon échange ; ça nous a permis de dire à la MONUSCO que jusque-là, nous n’avons pas encore repris notre collaboration avec elle. Mais depuis la suspension du dialogue, c’est pour la première fois qu’on se mettait autour d’une même table avec la MONUSCO », a ajouté Richard Kirimba.
Un certain intérêt pour des projets de la MONUSCO…
Toutefois, preuve de la volonté affichée par cette structure citoyenne de vouloir renouer sa collaboration avec la MONUSCO, elle se dit particulièrement intéressée à mieux comprendre le nouveau mandat de la MONUSCO, son plan de transition, mais aussi les modalités de mise en œuvre des projets à impact rapide et de réduction de la violence communautaire ainsi que l'organisation de sessions de renforcement des capacités de ses membres par la MONUSCO.
Pour la MONUSCO, il est important de reprendre cette collaboration avec une société civile intégrée pour discuter, en partenariat avec les autorités locales, des moyens communs de réduire l'insécurité, notamment en s'attaquant aux causes profondes, dont le chômage des jeunes. Pour Abdourahamane Ganda, « c'est dans un cadre de confiance mutuelle et d'efforts collectifs conjoints que l'insécurité pourrait être contenue ».
Jean Tobie Okala