Avant de connaître l’opposant historique et le chef charismatique de l’Union pour la démocratie et le progrès social (UDPS), Félix Tshisekedi a d’abord connu Etienne Tshisekedi comme un papa «pas vraiment gâteau», mais «qui punissait très rarement».
Félix Tshisekedi est l’un des enfants de l’opposant décédé le 1er février à Bruxelles. Quand il parle du politicien, «président» est de rigueur. Félix Tshisekedi est secrétaire général adjoint de l’UDPS, parti d’opposition dirigé par son père. Mais quand il évoque ses souvenirs d’enfance, c’est de «papa» qu’il parle.
En octobre 2016, il a accepté de relater à radiookapi.net quelques histoires de la famille Tshisekedi. Une famille profondément marquée par la lutte du père, opposant acharné au Marechal Mobutu.
Enfance studieuse
Aux dires de Félix Tshisekedi, son père a eu une «enfance studieuse».
Etienne Tshisekedi a été fortement marqué par la rigueur de son père, Alexis Mulumba, qui était catéchiste.
«Ils avaient un père assez rigoureux sur les principes, très exigeant sur l’éducation, qui ne faisait pas de cadeau de ce côté-là. On le ressent d’ailleurs avec sa personnalité aujourd’hui. Entre le père rigoureux et l’éducation à l’école catholique, c’est ça qui a fini par produire Etienne Tshisekedi que l’on voit aujourd’hui», analyse Félix.
Etienne Tshisekedi quitte rapidement le giron familial après ses études au collège Kamponde. Il vient à Kinshasa pour faire ses études universitaires à Lovanium. Il fait des études de droit.
«J’ai toujours aspiré à faire le droit, à pouvoir défendre les gens comme avocat devant les tribunaux. En choisissant les études de droit, j’ai vu que ça me conduisait à défendre la cause du peuple congolais, la cause des peuples, la cause des malheureux, de sortir leur misère», confiait-il à Radio Okapi en 2011.
Tshisekedi entre en politique avant de finir ses études universitaires.
Un papa que l’on voit peu
Comme beaucoup de politiques, Etienne Tshisekedi consacre beaucoup de son temps à sa carrière politique. A la maison, ses enfants ne le voient pas beaucoup.
«Il était assez distant, parce pris dans sa carrière politique. On ne le voyait quasiment pas. A peine le matin quand il nous déposait à l’école. A midi aussi parce qu’on revenait manger [à la maison]. Et c’est terminé. Le soir, quand on revenait, il n’était pas là », se souvient Félix Tshisekedi.
Le secrétaire général adjoint de l’UDPS se rappelle cependant d’un moment de détente passé en famille « au milieu des années 1970 ».
Les Tshisekedi se retrouvent à Moanda, ville portuaire de l’Ouest de la RDC.
Félix Tshisekedi se souvient encore de « cet excellent souvenir» et le relate ici :
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Mais, il reconnaît que des moments pareils étaient «rares».
La politique s’invite à la maison
La politique va finalement s’inviter au sein de la famille. Et de quelle manière !
Traditionnellement, la famille Tshisekedi réveillonne ensemble la nuit de la Saint Sylvestre. Mais, en cette année 1980, les choses ne vont pas se passer comme prévu.
Le 31 décembre 1980, les services de sécurité découvrent les copies de la lettre ouverte adressée au président Mobutu dans la résidence de Ngalula, l’un des 13 signataires. Il est arrêté. Informés, Tshisekedi et d’autres signataires de la missive, qui provoque la colère de Mobutu, se constituent prisonniers.
«C’est arrivé brutalement. On n’était pas préparé à ça», affirme Félix Tshisekedi qui apprend la nouvelle à la télévision. Il raconte cet après-midi:
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Dans l’après-midi de ce même jour, «un commando» armé se rend à la résidence du nouvel opposant pour tenter d’accéder au bureau d’Etienne Tshisekedi.
L’entrée d’Etienne Tshisekedi dans la dissidence est durement ressentie dans la famille. Ses innombrables emprisonnements et relégations ont marqué ses enfants.
«Je peux vous dire pour en avoir fait les frais, la dictature avait été très rude», raconte Félix Tshisekedi.
«Maman Marthe»
A l’UDPS, c’est une figure à part. Epouse de l’opposant historique, Marthe Tshisekedi est décrite par ceux qui l’ont côtoyée comme une «combattante».
Pour Félix Tshisekedi, si son père «a tenu» pendant toutes les années d’oppression sous le régime Mobutu, c’est grâce à son épouse.
«Dans toute cette épopée Tshisekedi, s’il y a quelqu’un à qui il faut remettre une fleur, c’est elle. Je pense qu’un jour, mon père nous le dira. C’est grâce à elle qu’il a tenu et que nous avons tenu. Elle a joué à la fois le rôle du père et de la mère», analyse-t-il.
Félix se souvient que sa mère suivait son père partout où il était envoyé en relégation:
«Ce n’était pas des palaces. Il y a eu des prisons souterraines comme à Belingo, une prison souterraine où il y avait des serpents. Elle le suivait. Elle allait partout. En même temps, elle tenait les affaires familiales grâce auxquelles nous continuons de vivre plus ou moins normalement».