CPI : Affaire Bemba, la défense demande un non-lieu et met en cause Ange Félix Patassé

Luis Moreno Ocampo, procureur de la CPI

Luis Moreno Ocampo, procureur de la CPI

Les audiences de confirmation des charges contre Jean-Pierre Bemba se sont clôturées jeudi à la CPI. La défense a demandé un non-lieu, estimant que le président du MLC n’est pas responsable des crimes commis en Centrafrique en 2002 et 2003. Elle a mis en cause le président centrafricain de l’époque, Ange Félix Patassé, dans les crimes imputés à l’ancien vice-président de la RDC. Pour l’accusation par contre, les preuves mises à charge de Jean-Pierre Bemba suffisent à justifier un procès.

Au cours de l’audience de jeudi, les avocats de Jean-Pierre Bemba ont exclu toute responsabilité de leur client dans les crimes commis, selon l’accusation, par les troupes du MLC en Centrafrique. « Ce n’est pas Jean-Pierre Bemba, mais le président Patassé qui donnait les ordres relatifs aux opérations militaires sur le terrain, et fixait les cibles », a affirmé maître Aimé Kilolo au cours de cette audience. « Ce sont les autorités centrafricaines, sur instruction directe de Ange Félix Patassé, qui ont fourni le matériel de combat, les véhicules, les carburants et les uniformes aux soldats du MLC. L’armement, les munitions et les moyens financiers ont été fournis par la Libye », a souligné Me Kilolo.

La défense demande donc un non-lieu. Pour ses avocats, Jean Pierre Bemba n’est même pas complice. « Sa participation s’est exclusivement limité à la mise à disposition de ses soldats pour soutenir un gouvernement démocratiquement élu, dans le cadre d’un accord régional africain », a affirmé, pour sa part, Me Nkwebe Lyris.

De son côté, l’accusation a affirmé, une fois de plus, que les preuves à charge de Bemba étaient suffisantes pour justifier un procès. Le procureur Fatou Bensouda a déclaré que les crimes n’avaient pas eu lieu par accident : « Ce ne sont pas des dommages collatéraux imputables à un conflit armé. Les meurtres étaient intentionnels. » Selon le procureur, Jean Pierre Bemba, en tant que commandant des troupes du MLC, savait que des crimes étaient commis et n’a rien fait pour les arrêter, alors que, selon elle, il aurait pu en éviter des centaines.

Entre-temps, affirme le porte-parole de la CPI en RDC, les juges ont 60 jours pour déterminer si les éléments de preuves fournis sont suffisants pour ouvrir la voie à un procès. Mais, précise Paul Madidi, il n’est pas exclu qu’ils rendent leur décision avant la fin de cette échéance.

Me Joseph Dunia : « Ange Félix Patassé pourrait influer sur le sort de Bemba

C’est l’avis de Me Joseph Dunia, membre du barreau de Goma et président de l’ONG « Promotion de la démocratie et protection des droits de l’Homme ». Il a estimé jeudi que si l’ancien président Ange Félix Patassé, qui a été cité par la défense, déclare que c’est bien lui qui avait le commandement des troupes du MLC déployées en Centrafrique, cela pourrait avoir de l’impact dans la suite de l’affaire Bemba : « Si et seulement si Ange Félix Patassé déclare avoir donné des ordres au commandement et unités de Jean Pierre Bemba, Jean Pierre Bemba pourrait être sauvé. Et, dans la mesure où le président centrafricain, qui exerçait l’autorité sur l’Etat centrafricain, déclare que le commandement appartenait à Jean Pierre Bemba, dans ce cas, Jean Pierre Bemba sera poursuivi et pourra être jugé. Au cas où il est établi qu’il n’avait pas de commandement sur ses troupes, il ne pourra pas être présenté devant les juges. »