Augustin Matata Ponyo, premier ministre plutôt respectable de la République démocratique du Congo (RDC), ex-Zaïre, ne pèche-t-il pas par excès d’optimisme en croyant que des casques bleus ramèneront la paix dans son pays ? Ce qui fonde cette humeur est l’adoption le 28 mars – par les cinq membres permanents du Conseil de sécurité de l’ONU, plus les dix représentants assis là temporairement – de la résolution 2098.
Elle est historique parce que l’ONU crée une force de combat chargée en l’occurrence de “mener des opérations offensives ciblées” contre les groupes d’insurgés dans l’est de la RDC. Pour Augustin Matata Ponyo, voilà donc une décision qui “pourra imposer la paix” dans cette région convoitée par ses voisins pour ses richesses minérales et mise en coupe réglée par d’innombrables milices – aux alliances volatiles – essentiellement forgées sur un critère : mon ethnie contre la tienne.
La résolution onusienne est en effet une bonne nouvelle. Poussée par le secrétaire général adjoint de l’ONU aux opérations de la paix, le Français Hervé Ladsous, elle dote la mission congolaise (Monusco) – la plus importante du monde avec 17 000 hommes déployés sur un territoire aussi étendu que l’Europe de Londres à Kiev – d’une unité combative. Autrement dit, une force réactive s’appuyant sur un mandat offensif qui trancherait avec cette passivité souvent reprochée aux casques bleus déployés de par le monde.
Mais, sans risque d’insulter l’avenir, par quel miracle ce contingent de 3 069 hommes venus du Mozambique, du Malawi, d’Afrique du Sud et de Tanzanie pourra-t-il “imposer la paix” dans l’est de la RDC où ils sont censés arriver d’ici quelques semaines ? Même équipé d’hélicoptères et d’une poignée de drones de surveillance dont on peut aussi poser la question de leur acuité visuelle au-dessus des forêts congolaises impénétrables.
UNE MULTITUDE DE GROUPES ET MICROGROUPES
A la différence de la Monusco, contrainte d’agir aux côtés de l’armée congolaise, cette nouvelle brigade d’intervention rapide pourra mener seule des interventions. Mais que pourront faire ces 3 000 hommes dans cette région “vraiment” en guerre ? Ils auront face à eux une multitude de groupes et microgroupes aux ambitions locales et aux motivations aussi variées qu’imprévisibles. Sans oublier, évidemment, l’ingérence des pays voisins – Rwanda, Ouganda pour l’est, Angola au sud, Congo au nord – qui connaissent finalement mieux le terrain que les casques bleus. La future brigade pourra sans difficulté être plus motivée et mieux entraînée que le gros des troupes onusiennes déployé depuis 1999 en RDC pour un bilan très mitigé. La dernière crise en date, l’offensive rebelle du M23 en 2012, a montré que la Monusco ne remplissait pas sa fonction première : protéger les populations civiles. La force de réaction rapide ne fera sans doute pas mieux.
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