Kinshasa : des denrées alimentaires vendues en morceaux dans les marchés

Une vue des commercants et clients au Marché Municipal de Matete (Kinshasa/RDC), Radio Okapi/Ph. Aimé-NZINGA

Des articles alimentaires et même cosmétiques se vendent de plus en plus en petits morceaux dans les marchés de Kinshasa. Radio Okapi a fait un tour, mercredi 6 mai, dans quelques uns de ces lieux de négoce notamment Selembao, Bayaka, Makala et Kingasani. Des vendeurs affirment qu’ils morcellent leurs produits pour faciliter les Kinois à se procurer ce qu’il veut à bas-prix, étant donné que le salaire minimum interprofessionnel garanti (Smig) du Congolais est de trois dollars américains. La solution à en croire un expert est de créer des emplois pour la population en majorité des chômeurs. Reportage.

Le marché de Selembao, l’une des communes les plus peuplées de la capitale congolaise, compte de nombreux «spécialiste en morcellement». Les vendeurs proposent des produits alimentaires et cosmétiques en petits morceaux. Un poulet entier varie entre 4 500 Francs congolais (4,8$US) et 6 000 Fc (6,5$US), selon le kilo.

Mais pour permettre aux habitants de ce coin, en majorité pauvre, de se procurer cette denrée, les vendeurs le découpent en petits morceaux en sorte qu’avec 500 Fc (0,5$US), 1 000 Fc (1,08$US) chacun soit en mesure de manger cet aliment.

« Si nous ne faisons pas ça, les gens n’auront pas la possibilité de manger le poulet. Ils devront peut-être attendre les fêtes [très souvent de fin d’années] pour s’en procurer. En morcelant cet article, nous les aidons », affirme une vendeuse de Sélembao.

La même réalité est aussi vécue dans d’autres marchés de la capitale, à l’instar de Bayaka (Ngiri-Ngiri), Kingasani (Kimbanseke) et Matete. Les prix des articles alimentaires et cosmétiques sont presque les mêmes.

Une boite de tomate qui se vend généralement à 200 Fc (0,21$US) est mise dans de petits sachets en forme de boule ficelée pour un prix de 100 Franc (0,11$US) pour la moitié.

L’huile de palme et végétale est vendue à partir de 100 Fc (0,11$US) et plus.

Des acheteurs rencontrés sur place indiquent qu’ils n’ont pas assez de moyens pour se procurer un bidon de 5L de cette denrée ou une bouteille de 1,5L.

« Avec 100 Fc (0,11$US), je peux me procurer de l’huile. Ça me suffit. Le jour où j’aurai plus d’argent, j’en achèterai une quantité beaucoup plus consistance », déclare une dame venue faire le marché à Bayaka, dans la commune de Ngiri-Ngiri.

Non loi, de cet étalage, il y a un tas de farine de manioc « Fufu » non moulu. Il est vendu à partir de 300 Fc (0,32$US), une mesure de « Sakombi » à 200 Fc (0,21$US) ou même à 100 Fc (0,11$US).

Des produits cosmétiques aussi…

Il n’y a pas que de produits alimentaires qui sont concernés par cette pratique. Il y a aussi des articles de beauté et cosmétiques. Au-delà de manger, il faut aussi se faire beau, belle…et se laver.

Et la solution est encore à trouver dans le morcellement des marchandises.

Les jeunes filles peuvent se procurer, dans ces marchés, le gel coiffant pour cheveux dans de petits sachets en boule, avec 50 Fc (0,5$US). Une boite entière se vend généralement à 2000 Fc (2,17 $US).

Et pour se laver, aucun souci. Avec 50 Fc (0,5$US) seulement, vous avez la possibilité de vous acheter un morceau de savon. Un savon antiseptique entier se vend entre 200 Fc (0,21$US) et 500 Fc (0,54$US).

Création d’emplois

Des observateurs se demandent si ce phénomène de miniaturisation ne démontre-t-il pas le degré de pauvreté dans laquelle notre pays est plongé.

Le professeur Emery Kituku, expert en questions économiques, plaide pour l’amélioration de salaire et la création d’emplois pour éradiquer ce phénomène.

« C’est un mouvement paradoxal. Au lieu que ce soit la population qui atteigne le niveau de la production, c’est la production qui fournit un effort pour atteindre le niveau le plus bas de la population. Celle-ci n’arrive pas à consommer réellement ce qui est produit et en majorité en chômage », argue-t-il.

Il souligne que la majorité de la population est sans emploi et que ceux qui travaillent n’ont pas de revenus suffisants qui leur permettent « de rencontrer le marché dans son fonctionnement normal ».

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