Nouvelles lectures du Coran, favorables aux femmes

Des participantes au premier Congès féminin d’Oran sur la culture de la paix/ Ph Elisabeth Busquet

Protégé par des dispositifs de sécurité à la fois présents et discrets, avec une très forte participation des autorités ministérielles et administratives algériennes, le 1er congrès international féminin pour une culture de paix s’est ouvert le 28 octobre au matin dans l’auditorium de l’hôtel Méridien d’Oran, entièrement rempli. Un succès éclatant pour cet événement sans précédent en Algérie, mais aussi dans le monde musulman.

Le Cheikh Khaled Bentounès, dans son allocution, a invité les participants « à ouvrir ce Congrès avec notre cœur, afin que la paix et une culture de paix nourrissent notre esprit : pour que naissent des initiatives et des actions en faveur d’une réalité palpable, visible, comme autant de graines d’espoir ». Il a également eu un mot particulier pour les journalistes, en « espérant qu’ils ne soient pas uniquement présents par curiosité, mais qu’eux aussi ouvrent leur cœur, qu’ils soient animés par une intention sincère, de construction de la paix ».

Les premières prises de paroles ont fait allusion à la parole coranique, trop utilisée à des finalités guerrières et d’intérêts particuliers, et qui génère souvent une souffrance dont les femmes sont victimes. Parmi les interventions, celle du docteur en sciences sociales, philosophe et anthropologue tunisien Youssef Seddik, spécialisé dans les sciences coraniques et la Grèce antique. Il a fait valoir une lecture du Coran pas encore vraiment installée, reconnaissant l’unité de l’être humain avec deux fonctions différenciées. Il a développé certains points où le Coran, contrairement aux idées que l’on peut en avoir ou à celles prétendues de certains courants, donne une supériorité à la femme, ou des traitements préférentiels : « Dans le jugement pour adultère, par exemple, elle subira la seule colère de dieu alors que l’homme, poursuivi pour la même accusation, sera banni de l’univers ».

Youssef Seddik a également eu recours au comportement de la langue arabe vis-à-vis du féminin : « Chaque fois que le Coran parle de la femme comme donneuse de vie, qu’il parle de sexualité, le Coran produit une transgression grammaticale : il casse la préséance en faisant passer la femme avant l’homme ». Et de rappeler que la langue française, par exemple, conserve dans sa grammaire la prédominance du masculin en toutes circonstances !

L’ancien ministre sénégalais Djibril Sene, a abondé dans ce sens. Il a rappelé, sans évoquer explicitement les courants obscurantistes de l’Islam, que « l’interprétation des écritures nécessite une connaissance approfondie, et de la langue et de la spiritualité. » Il a ajouté : « Celles et ceux qui s’avancent dans cette interprétation sans avoir cette connaissance… », en laissant le soin à chacun de tirer la conclusion qui lui semblera correcte.

Les ateliers de l’après-midi, regroupant chacun plus d’une centaine de personnes, ont abordé des thèmes sensibles, et ont été objet d’échanges parfois complexes : rupture avec les stéréotypes féminins, violences faites aux femmes, répartition du rôle et des responsabilités, mystique au féminin, féminin dans le Coran, relation sacrée avec la mère, thérapie de l’âme, vivre sa grossesse en harmonie, etc.