Affaire forages d’eau : Nicolas Kazadi, François Rubota et Guy Mikulu interdits de sortir du pays

Une information judiciaire a été ouverte par le parquet général près la Cour de cassation à charge des ministres des Finances Nicolas Kazadi et du Développement rural François Rubota, mais aussi de Guy Mikulu, a appris ce dimanche 28 avril Radio Okapi. Selon le parquet, c'est en rapport avec l'affaire du détournement présumé des fonds destinés aux forages d'eau à travers la République.

Dans le but d'empêcher que les trois personnes accusées de détournement présumé des deniers publics ne puissent se soustraire des poursuites judiciaires engagées contre elles, le procureur général Firmin Mvonde a enjoint, depuis le 27 avril, à la Direction générale de migration (DGM) d'instruire tous ses services œuvrant aux postes frontaliers d'interdire ces personnes de sortir du pays et de Kinshasa où elles sont tenues de répondre devant l'organe de la loi.

De la genèse du dossier

Tout part du contrat de l'installation de 1000 forages et de construction de stations mobiles de traitement d'eau dans 1000 localités à travers la RDC. Le Gouvernement congolais, représenté par le ministère du Développement rural et le consortium STEVERS Construct-sotrod Water, sont tombés d’accord en avril 2021. Le projet a été évalué à près de 400 millions dollars américains, 398.982.383USD pour être précis. 

Deux ans après, le rapport conjoint de l'Observatoire de la dépense publique (ODEP) et la Ligue congolaise de lutte contre la corruption (LICOCO), publié le 12 avril 2024, a évoqué un possible détournement de fonds et a dénoncé la surfacturation du marché public. Ces deux structures de la société civile proposent la mise en place d'un comité de suivi de ce projet.

Dans un document du 11 avril dernier, le ministre des Finances affirmait obtenu la révision à la baisse du prix unitaire d'un forage, qu'il estimait très élevé.

« C'est ainsi que ledit consortium avait décidé d'augmenter le nombre de stations à livrer à l'État congolais, de 1000 à 1340 pour un coût unitaire de 297.748 dollars américains », avait expliqué le ministère des Finances.

Implication de la Justice

Le dossier est désormais entre les mains de la Justice qui tente de localiser les forages d'eau livrés au Gouvernement. Dans un réquisitoire publié le 18 avril dernier, le procureur général près la Cour de cassation, Firmin Mvonde, avait chargé le directeur général du Bureau technique de contrôle(BTC)  de se rendre au siège de STEVERS pour obtenir des informations sur l’exécution dudit projet.

Le samedi 20 avril dernier, le consortium STEVERS Construct-sotrod Water a annoncé la livraison, au mois de juillet prochain, de 239 stations de forage, tout en qualifiant « d'infondées» les accusations de surfacturation du projet.

Nicolas Kazadi botte en touche

 Au cours d'un briefing avec la presse à Kinshasa, le ministre des Finances, Nicolas Kazadi, a affirmé que le projet relatif aux forages n'a pas débuté avec le Gouvernement, dirigé par le Premier ministre Jean-Michel Sama Lukonde. Mais il remonte au Gouvernement Sylvestre Ilunga Ilunkamba.

Dans son intervention, Nicolas Kazadi a rejeté les allégations de surfacturation. Il rappelle que le paiement du prestataire a été validé sur la base de l'engagement pris par son prédécesseur, José Sele Yalaghuli, pour un montant de 80 millions USD réparti en cinq tranches annuelles.

Il a précisé qu'il n'a pas encore versé la totalité, mais trois paiements échelonnés à hauteur de 71 millions USD ont été versés, conditionnant le versement du solde après l'achèvement des livraisons correspondant aux 71 millions USD déjà versés.

« Il y a quelques semaines, le ministre du Développement rural a présenté en conseil des ministres le projet, en disant que tout se passait bien, notamment avec les stations à Kisangani. Il a demandé que nous poursuivions le projet, et j'ai accepté, mais je ne paierai pas tant que les 71 millions USD ne seront pas entièrement utilisés. C'est ce que je demandais, et je ne dévierai pas de cette position, cela a été acté en conseil des ministres », avait expliqué Nicolas Kazadi dans les propos repris par Actuelite.cd.

« Qui a surfacturé, et y a-t-il eu surfacturation ? Je ne sais pas, mais ce que je sais, c'est que j'avais remarqué que 400 000 en moyenne, c'était trop, et ils ont obtenu de réduire à 300 000, ou un peu moins. S'il y a des gens qui ont surfacturé, ce n'est certainement pas moi ; au contraire, j'ai obtenu une baisse. A-t-on payé l'argent sans livrer ? Non, j'étais ferme. Le contrat prévoyait un premier paiement de 80 millions USD ; j'ai payé 71 millions. Je vous laisse d'abord terminer vos 71 millions. Vous n'avez pas terminé, je ne bouge pas », a-t-il ajouté.

L’information judiciaire ouverte par le procureur près la Cour de cassation permettra de faire la lumière sur cette affaire.

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